12 janvier 2007
5
12
/01
/janvier
/2007
23:57
Peut-être certains se souviennent-ils d'un reportage des journalistes Grégoire Deniau et Cyril Payen diffusé à une heure tardive le 16 juin 2005 dans l'émission 'Envoyé spécial' sur France2 ? Sous le titre de "Guerre secrète au Laos" il évoquait le sort des Hmongs, une population en perdition dans la jungle, traquée de concert par les armées laotiennes et vietnamiennes, et réduite au plus complet dénuement. Comme un reportage comparable diffusé en mai 2004 par la BBC l'avait fait pour le public anglais, cette émission saisissante nous faisait découvrir que dans les forêts denses du Laos, 30 ans après, la Guerre du Vietnam n'est pas terminée...
Cela ressemble à ces histoires de combattants isolés sur une île qui se croient toujours en lutte longtemps après la fin d'une guerre, la nouvelle de l'armistice ne leur étant jamais parvenue. Mais la guerre en ce cas continue vraiment et continuera jusqu'à extermination complète des quelque 10.000 malheureux survivants de cette folie - ce qui ne saurait tardé.
Il y a un an, le public français s'était ému de cette affaire qui touche une minorité autrefois alliée de la France en Indochine. Une pétition rassemblant près de 15.000 signatures a été adressée au président Jacques Chirac, à ce jour sans réponse et sans effet... Et le sujet est retourné à la trappe médiatique aussi soudainement qu'il en était sorti. Au demeurant, aucun des intellectuels de médias, d'ordinaire si prompts à s'indigner (cf. la Tchétchénie), ne semble s'être intéressé aux Hmongs. Aucun, si je ne me trompe, n'est venu appuyer de son illustre signature ce mouvement de sympathie spontanée.
Il faut dire que le sujet dérange : l'Indochine est loin, le Laos devient une destination touristique, ELF s'installe, mais ce qui dérange peut-être le plus c'est que les Hmongs ont fait un choix de Harkis. Au service de la France jusqu'en 1954, combattants de Dien Bien Phu pour certains, ils ont ensuite été employés par la CIA entre 1962 et 1975 pour surveiller la frontière du Vietnam et récupérer les pilotes d'hélicoptères abattus, en une guerre restée secrète puisque officiellement le Laos n'y était pas impliqué. Quand les Américains ont battu en retraite et quand, en mai 1975, les communistes du Pathet Lao ont pris le pouvoir à Vientiane, la capitale du pays, une partie de ces montagnards Hmongs a été réinstallée de force dans les plaines, tandis que les autres - notamment les plus impliqués dans la collaboration avec les USA, et leurs familles - n'ont eu d'autre choix que l'exil (un tiers des Hmongs a fui le pays dans les années 70) ou le maquis sur les pentes difficiles d'accès du mont Phu Bia (pour environ 30.000 d'entre eux), pour échapper aux camps de rééducation.
Il semble que leur notoriété récente, aussi fugace qu'elle ait été, n'ait fait qu'empirer les choses pour les exilés de l'intérieur, aujourd'hui réduits à une dizaine de milliers, dont beaucoup d'enfants. L'étau se resserre autour de ces Hmongs de la jungle répartis en petits groupes errants : pourchassés, soumis à toutes les exactions lorsqu'ils ne fuient pas assez vite, privés d'approvisionnement, se nourrissant de racines, il leur devient très difficile de survivre et ils sont de plus en plus nombreux à sortir de la forêt et à se rendre. Alors cependant, on ignore quel destin ait le leur puisque les autorités laotiennes préfèrent nier leur existence et empêchent tout contact avec eux. Quant à ceux expulsés de Thaïlande où ils pensaient trouver refuge, ils sont soumis à rééducation, une vieille tradition de la région dans le style khmer rouge... Evidemment, le fait que le Laos soit toujours sous le régime d'une dictature communiste ne facilite guère une résolution douce du conflit (!) si tant est que l'on puisse encore parler de conflit alors que cette résistance aux pieds nus est exsangue (leurs munitions sont celles abandonnées par les Américains il y a 30 ans).
Enfin bon, tant que nous n'avons pas d'intérêt particulier à bombarder ce côté-là de la planète, il n'y a pas lieu que nos médias se focalisent sur le sort des Hmongs ! Les indignations ne valent qu'à l'appui d'une politique... En attendant, le Laos est aussi le 3e producteur mondial d'opium après l'Afghanistan et la Birmanie, et un des pays les plus pauvres du monde. Sale histoire !
Cela ressemble à ces histoires de combattants isolés sur une île qui se croient toujours en lutte longtemps après la fin d'une guerre, la nouvelle de l'armistice ne leur étant jamais parvenue. Mais la guerre en ce cas continue vraiment et continuera jusqu'à extermination complète des quelque 10.000 malheureux survivants de cette folie - ce qui ne saurait tardé.
Il y a un an, le public français s'était ému de cette affaire qui touche une minorité autrefois alliée de la France en Indochine. Une pétition rassemblant près de 15.000 signatures a été adressée au président Jacques Chirac, à ce jour sans réponse et sans effet... Et le sujet est retourné à la trappe médiatique aussi soudainement qu'il en était sorti. Au demeurant, aucun des intellectuels de médias, d'ordinaire si prompts à s'indigner (cf. la Tchétchénie), ne semble s'être intéressé aux Hmongs. Aucun, si je ne me trompe, n'est venu appuyer de son illustre signature ce mouvement de sympathie spontanée.
Il faut dire que le sujet dérange : l'Indochine est loin, le Laos devient une destination touristique, ELF s'installe, mais ce qui dérange peut-être le plus c'est que les Hmongs ont fait un choix de Harkis. Au service de la France jusqu'en 1954, combattants de Dien Bien Phu pour certains, ils ont ensuite été employés par la CIA entre 1962 et 1975 pour surveiller la frontière du Vietnam et récupérer les pilotes d'hélicoptères abattus, en une guerre restée secrète puisque officiellement le Laos n'y était pas impliqué. Quand les Américains ont battu en retraite et quand, en mai 1975, les communistes du Pathet Lao ont pris le pouvoir à Vientiane, la capitale du pays, une partie de ces montagnards Hmongs a été réinstallée de force dans les plaines, tandis que les autres - notamment les plus impliqués dans la collaboration avec les USA, et leurs familles - n'ont eu d'autre choix que l'exil (un tiers des Hmongs a fui le pays dans les années 70) ou le maquis sur les pentes difficiles d'accès du mont Phu Bia (pour environ 30.000 d'entre eux), pour échapper aux camps de rééducation.
Il semble que leur notoriété récente, aussi fugace qu'elle ait été, n'ait fait qu'empirer les choses pour les exilés de l'intérieur, aujourd'hui réduits à une dizaine de milliers, dont beaucoup d'enfants. L'étau se resserre autour de ces Hmongs de la jungle répartis en petits groupes errants : pourchassés, soumis à toutes les exactions lorsqu'ils ne fuient pas assez vite, privés d'approvisionnement, se nourrissant de racines, il leur devient très difficile de survivre et ils sont de plus en plus nombreux à sortir de la forêt et à se rendre. Alors cependant, on ignore quel destin ait le leur puisque les autorités laotiennes préfèrent nier leur existence et empêchent tout contact avec eux. Quant à ceux expulsés de Thaïlande où ils pensaient trouver refuge, ils sont soumis à rééducation, une vieille tradition de la région dans le style khmer rouge... Evidemment, le fait que le Laos soit toujours sous le régime d'une dictature communiste ne facilite guère une résolution douce du conflit (!) si tant est que l'on puisse encore parler de conflit alors que cette résistance aux pieds nus est exsangue (leurs munitions sont celles abandonnées par les Américains il y a 30 ans).
Enfin bon, tant que nous n'avons pas d'intérêt particulier à bombarder ce côté-là de la planète, il n'y a pas lieu que nos médias se focalisent sur le sort des Hmongs ! Les indignations ne valent qu'à l'appui d'une politique... En attendant, le Laos est aussi le 3e producteur mondial d'opium après l'Afghanistan et la Birmanie, et un des pays les plus pauvres du monde. Sale histoire !